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Nicolas Machiavel

Nicolas Machiavel - René HYS

Avertissement

Cette note de lecture est constituée d’extraits commentés de la pensée de Nicolas Machiavel dans son ouvrage : Le Prince. Il s’agit d’une première approche destinée à des néophytes intéressés par les grands principes de la stratégie ou simplement curieux de comprendre ce que recouvre réellement le mot « machiavélisme ».

L’objectif n’étant pas dans un premier temps de tendre à l’exhaustivité, les extraits et commentaires présentés sont issus de notre propre réflexion et sont à appréhender comme une boîte à outils constituée des principaux concepts stratégiques, agrémentée de quelques exemples succincts, conseils pratiques et confrontations d’idées.

Les extraits et commentaires ne prétendent pas fournir une vision exhaustive de l’oeuvre. Ils représentent une boîte à outils des principaux concepts stratégiques, agrémentés de quelques exemples succincts, conseils pratiques et confrontations d’idées. Les autres auteurs cités et étudiés ultérieurement, peuvent présenter des théories contradictoires. Ils sont souvent le reflet de structures sociétales et d’époques très éloignées. Leurs théories malgré leurs apparentes divergences sont en réalité complémentaires. Toutes ces visions et analyses diverses se rejoignent souvent.

Nicolas Machiavel, théoricien de la raison d’Etat

Nicolas Machiavel qui dans son ouvrage enseigne un dirigeant (le Prince) est considéré comme le théoricien de la « raison d’État ». Ses théories trouvent de nos jours des illustrations concrètes. C’est par exemple le cas dans la « Realpolitik ». Ou encore, dans l’essor qu’à eu le Storytelling appliqué avec une insolence rare par Karl Rove, conseiller en communication du Président Georges Walker Bush. Un des membres de l’équipe du conseiller a osé déclarer à l’éditorialiste du Wall Street Journal : « Vous croyez que les solutions émergent de votre judicieuse analyse de la réalité observable […]. Ce n’est plus de cette manière que le monde marche réellement […], lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et, pendant que vous étudiez cette réalité, judicieusement comme vous le souhaitez, nous agissons à nouveau et nous créons d’autres réalités nouvelles, que vous pouvez étudier également, et c’est ainsi que les choses se passent. »

[ La Realpolitik est un principe de gestion très diplomatique des conflits. Le terme est pour la première fois utilisé à propos de Otto von Bismarck, directement issu des principes de Machiavel. Il réapparait avec les théories du Cardinal de Richelieu. Toutefois, la notoriété de cette notion est plus récente. Elle sera pleinement explicite avec le Président Richard Nixon et Henri Kissinger à propos de leur volonté de rapprochement avec la Chine maoïste en dépit de divergences idéologiques a priori totalement incompatibles.]

[Le Storytelling est l’art de la propagande au moyen de la narration d’histoires dans le but de formater les esprits.]

Un regard sur la stratégie

Nicolas Machiavel comme SunTzu, Carl von Clausewitz, Miyamoto Musashi ou Sir Basil Henry Liddell Hart nous donnent les outils de base permettant non seulement de disséquer les défaites et victoires passées mais surtout de mettre en place des stratégies futures avec d’autant plus d’efficacité que certains principes sont universels et peuvent être passés au crible des civilisations, des divergences des stratégistes et stratèges, et de l’analyse psychologique.

Quoique subjective, la structure en quatre chapitres est l’image de notre propre représentation pédagogique de la pensée de Machiavel.
Nous conclurons cette présentation en citant Miyamoto Musashi : « Il faut s’exercer à la tactique de telle façon qu’elle soit utile à n’importe quel moment et il faut l’enseigner de telle manière qu’elle soit applicable à tous les domaines. C’est en cela que consiste la vraie Voie de la tactique. » Gorin No Sho, II Terre. [ A noter que pour Miyamoto Musashi le terme « tactique » correspond au terme « stratégie ». Ses développements sont axés sur le combattant individuel et la stratégie est pour lui la stratégie du guerrier isolé].

TITRE I De la Morale

 « Il faut comme je l’ai dit, que tant qu’il le peut il ne s’écarte pas de la voie du bien, mais qu’au besoin il sache entrer dans celle du mal »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XVII

La seule loi dirigeant la politique est l’efficacité. A ce titre Nicolas Machiavel dissocie Morale et Politique. La Politique doit savoir sacrifier les principes éthiques face à une efficacité qui reste primordiale. C’est la raison pour laquelle Machiavel est souvent considéré comme l’inventeur du concept de « Raison d’État ».

Un mal ou une cruauté peuvent être indispensables dans le cadre de l’action politique et même considérés comme un bien. Cependant cette cruauté n’en reste pas moins moralement mauvaise. Un mal indispensable n’est pas lavé moralement du seul fait de son nécessaire emploi politique. Pour régler les maux de la société, la Morale ne suffisant plus, le remède est donc la politique.

Morale et Politique

Louis Althusser commentant Le Prince précisera « Le Prince ne peut-être jugé que sur un seul critère : le succès […] », en précisant aussi « A condition toutefois de bien comprendre que ce résultat est lui-même défini par la tâche historique du Prince ». Louis Althusser, Machiavel et nous, Écrits philosophiques et politiques. Le Prince n’est donc pas immoral ou amoral. Il doit être en mesure de faire passer au second plan la morale commune pour épouser une efficacité morale supérieure. Machiavel dissocie les deux concepts de Morale et de Politique et affirme la primauté du second sur le premier. Cette différenciation très nette est évidemment à rapprocher de l’affirmation de Miyamoto Musashi : « La vraie Voie, c’est vaincre »

« Le Prince, devant donc agir en bête, tachera d’être tout à la fois renard et lion; car s’il n’est que lion, il n’apercevra point les pièges; s’il n’est que renard, il ne se défendra point contre les loups »
« […] ce qui est absolument nécessaire, c’est de savoir bien déguiser cette nature de renard, et de posséder parfaitement l’art et de simuler et de dissimuler »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XVII

La création d’illusions

Sun Tzu, affirme fortement « l’Art de la guerre est basée sur la duperie ». Plus tard, Clausewitz précise : « Aucune activité ne paraît plus apte que la ruse à diriger l’activité stratégique ». De tous temps, le mensonge, la ruse et la dissimulation sont les moteurs permettant la création d’apparences. Ils sont des leurres ouvrant des brèches relatives qui doivent être immédiatement exploitées.

La création d’apparences au combat et selon l’expression consacrée de Sir Basil Henry Liddell Hart dans « la grande stratégie », s’organise autour de l’art de simulation du Prince. C’est à lui que revient le rôle du grand propagandiste créant des illusions favorables à la poursuite de ses plans.. Il le fait hors et sur le champ de bataille, dans les négociations autant que dans la conduite des troupes.

Sur un plan moral cet art de la simulation, de la dissimulation et du mensonge n’est qu’une posture tactique. Il n’est donc ni moral, ni immoral, car il est un outil indispensable dans la préparation d’un processus stratégique.

« La croyance que, sans toi, Dieu se battra pour toi, tandis que tu resteras à ne rien faire à ton prie-Dieu a perdu plus d’un royaume et plus d’un État».

Nicolas Machiavel, L’âne d’Or, chant V

Carl von Clausewitz considère que « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Nicolas Machiavel, en revanche, affirme que la guerre est l’essence de la politique. Pour lui, la réalité du politique est celle de la force ou plutôt de l’affrontement des forces. La crise est le mode normal de fonctionnement de la politique, la paix n’en est qu’un aléa.

TITRE II Des apparences

« Il est toujours bon, par exemple, de paraître, clément, fidèle, humain, religieux, sincère; il l’est même d’être tout cela en réalité : mais il faut en même temps qu’il soit assez maître de lui pour pouvoir et savoir au besoin montrer les qualités opposées. »
« Tout le monde voit ce que vous paraissez; peu connaissent à fond ce que vous êtes, et ce petit nombre n’osera point s’élever contre l’opinion de la majorité. »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XVIII

Le Prince se doit de passer maître dans l’art de l’apparence et de la dissimilation. Il doit être avant tout l’artisan de sa propre image. Sun Tzu dit : « Par simulation et dissimulation, masquer ses dispositions et son but final en créant des apparences destinées à égarer et abuser l’ennemi ». La deuxième guerre punique est une parfaite illustration de ce principe. Hannibal Barca, grand tacticien est aussi un étonnant créateur d’apparences. Miyamoto Musashi, lui aussi, insiste sur ce point : « Paraissez nonchalant au début et tout à coup passez fortement à l’assaut »

L’apparence est tout. Elle est présente dans la gestion de l’image du Prince, dans la conduite des combats et dans la guerre elle-même. C’est pourquoi gouverner c’est faire croire. Le rapport avec le Storytelling évoqué dans l’avertissement est ici clair. L’objectif du Storytelling est certes de raconter des histoires mais c’est avant tout l’art d’inventer des histoires.

Le Prince communiquant

Le Prince est le premier ordonnateur de son image. L’image en tant que fondatrice du processus stratégique est la première des apparences. Travaillée en permanence, elle permet de réaliser l’alchimie des « qualités opposées ». Un équilibre doit alors apparaître entre justice et efficacité, entre bonté et intransigeance. Il n’est nullement question de justice des décisions, ni de justesse de l’image. Les décisions doivent être efficaces et concourir à l’objectif de la stratégie. L’image quant à elle doit être utile au Prince.

« En faisant en sorte que dans toutes ses actions, on trouve de la grandeur, du courage, de la gravité, de la fermeté »
« Le Prince qui a donné de lui cette idée est très considéré, et il est difficile que l’on conspire contre celui qui jouit d’une telle considération »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XIX

Il est nécessaire de créer des apparences notamment en travaillant son image. Le chef qui sait punir sans être injuste devient respecté. En étant respecté il ne génère pas ses propres ennemis. Ce point est important, car il guide les décisions et attitudes à adopter face notamment à des trahisons. Avant toute punition, il est nécessaire de s’assurer d’une part que celle-ci est juste, d’autre part d’évaluer si elle crée un ennemi. Il faut donc savoir éliminer un ennemi sans hésitation. Ensuite, il faut créer des apparences pour susciter la considération et la crainte, plutôt que le mépris et la haine.

Illusion du Prince et illusions militaires

Nicolas Machiavel est, avec Le Prince, à la manœuvre dans un traité du Gouvernant. Il n’est que succinctement dans l’action combattante au sens militaire du terme, comme peuvent l’être les stratégistes et stratèges militaires. L’image, l’illusion sont appréhendées sous un plan managérial alors que Sun Tzu, ou Clausewitz traitent directement de l’action militaire.

Sun Tzu a une vision plus universelle de l’illusion en la concevant tant sur le plan diplomatique que sur le plan militaire. C’est pourquoi que les visions de Sun Tzu et de Machiavel sont complémentaires et intimement liées.
Nous pouvons différencier diverses situations de création d’apparences et de gestion de la communication. En premier lieu, Le Prince lui-même et son image. En deuxième lieu, l’action du Prince en incluant les apparences destinées à créer des histoires autour de son action politique. Et enfin, les différentes manœuvres tactiques applicables dans un conflit ouvert (militaire) ou dans un conflit d’influence (diplomatique).

Machiavel s’attache avant tout à l’image du Prince. A ce titre il définit les bases du conseil en communication, domaine sujet à toutes les dérives. La gestion de l’image du Prince est stratégique. Elle est et demeure la pierre angulaire de l’ensemble des apparences à créer dans les sphères politiques, diplomatiques et militaires.

Par extension, le travail sur l’image du Prince porte le germe de la première approche indirecte. L’approche indirecte est mise en avant par Sir Basil Henry Liddell Hart dans son ouvrage Stratégie. Il la définit comme une manipulation initiale destinée à préparer un terrain favorable aux actions ultérieures.

TITRE III Des hommes

« Ceux-ci [les Grands] veulent opprimer, et le peuple veut seulement n’être point opprimé»

Nicolas Machiavel, Le Prince, IX

Les Grands tendent toujours à déstabiliser le pouvoir du Prince, alors que le peuple est au contraire prêt à l’accepter pourvu qu’on le laisse jouir de sa tranquillité. [Les Grands sont pour Machiavel, les membres du corps politique au pouvoir, il utilise aussi l’expression « Les Nobles »]. Trahisons et putschs proviennent toujours des proches. Leur proximité avec le pouvoir les conduit à le contempler et considérer qu’il est à leur portée. C’est la raison pour laquelle la sanction des Grands doit toujours être exemplaire. Les Grands sont une menace permanente pour la sécurité et la stabilité de l’État. Cette réflexion semble d’autant plus importante à Machiavel qu’il y consacre un titre entier [ Chapitre XXIII Comment on doit fuir les flatteurs].

« Voyez vous un ministre songer plus à lui-même qu’à vous, et rechercher son propre intérêt dans toutes ses actions, jugez aussitôt qu’il n’est pas tel qu’il doit être […] »
« Mais il faut de son côté que le prince pense à son ministre, s’il veut le conserver toujours fidèle; il faut qu’il l’environne de considération, qu’il le comble de richesses, qu’il le fasse entrer en partage de tous les honneurs et de toutes les dignités, pour qu’il n’ait pas lieu d’en souhaiter davantage […] »
« Quand le Prince et le ministre sont tels que je le dis, ils peuvent se livrer l’un à l’autre avec confiance : s’ils ne le sont point, la fin sera également fâcheuse pour tous les deux »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XXII

L’intelligence collective, une parade ?

C’est par extrapolation la règle dominant notre monde contemporain dans la constitution de noyaux durs autour d’un leader en conquête. L’histoire politique nous démontre l’incroyable efficacité de la constitution d’équipes resserrées, stables, fidèles, durables, motivées et récompensées dans certains parcours de dirigeants ayant accédé au pouvoir. Nous remarquons aussi que l’implosion de ces équipes rapprochées conduit immanquablement à une défaite plus ou moins rapide du champion. L’illustration parfaite du fonctionnement de ces équipes, véritables meutes, nous est donnée par Machiavel lui-même :

« Il doit s’il est prudent, faire choix dans ses États de quelques hommes sages, et leur donner, mais à eux seuls, liberté entière de lui dire la vérité. […] »
« […] les conseiller sur tout, écouter leurs avis, résoudre ensuite par lui-même; il doit encore se conduire […] de manière à leur persuader qu’ils lui agréent d’autant plus qu’ils parlent avec plus de franchise »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XXIII

« Réprimander et corriger quelqu’un pour ses erreurs est important. Cet acte essentiellement charitable est la première obligation du samouraï » Extrait du HAGAKURE [Le Hagakure est une compilation de pensées et réflexions du début du 18eme siècle au Japon. Il est aussi considéré comme le Code du Samouraï].

Le Prince, chef d’équipe

Le Prince doit attacher un soin particulier à la constitution de son équipe. Il doit aussi se montrer remarquable dans sa gestion managériale. Selon une maxime militaire courante « Une équipe est toujours à l’image de son chef ». L’équipe solide qui sera constituée doit être durable et permettre la démultiplication naturelle de l’action dans une démarche d’intelligence collective.

«On peut répondre que le mieux serait d’être l’un et l’autre. Mais comme il est très difficile que les deux choses existent ensemble, je dis que, si l’une doit manquer, il est plus sûr d’être craint que d’être aimé […] »
« On peut, en effet, dire généralement des hommes qu’ils sont ingrats, inconstants, dissimulés, tremblants devant les dangers et avide de gain; que tant que vous leur faites du bien, ils sont à vous […] mais lorsque le péril approche, ils s’éloignent bien vite.  […] »
« Cependant, le Prince qui veut se faire craindre doit s’y prendre de telle manière que, s’il ne gagne point l’affection, il ne s’attire pas non plus la haine. »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XVII

Seule l’assurance de sa propre force permet la bienveillance et la sévérité justement équilibrées. Savoir punir, en sachant pardonner, savoir récompenser et savoir écouter sont des qualités essentielles du chef. Un chef craint mais respecté génère des fidélités sans faille.

TITRE IV Du Prince

« Toutes les choses de ce monde ont un terme à leur existence »

Nicolas Machiavel, Discours, III

La valeur des systèmes politiques est dépendante de contingences fluctuantes que sont les facteurs sociologiques et historiques, mais aussi l’environnement international. Selon le principe que toutes les choses de ce monde finissent par s’éroder et disparaître, le Prince doit accomplir une tâche de régénération permanente. Ce principe est bien sûr applicable à l’attitude personnelle du Prince. Une personnalité combattante dans le cadre d’une conquête en cours doit aussi savoir changer de rythme.

Deux principes viennent éclairer ce propos. D’une part Miyamoto Musashi : « Tout est dans le rythme », qui implique, de facto, qu’une modification des situations ne peut qu’aboutir à un changement du rythme. D’autre part Sun Tzu : « C’est à un instant précis que le torrent précipite les rochers dans sa course ».

Préparation et adaptation

Ces deux principes sont en réalité l’expression d’une même idée. En effet, la guerre étant l’essence même de la politique, Machiavel insiste sur la nécessité d’une préparation et d’une adaptation permanentes permettant des accélérations. Cette préparation ne se limite pas à un entraînement des forces combattantes mais s’étend à un véritable formatage de l’esprit. C’est par ce formatage que l’outil intellectuel du dirigeant devient affûté et en mesure d’agir avec justesse et promptitude au moment opportun. La justesse et la promptitude constituent la base permettant d’atteindre l’efficacité.

« […] savoir si le Prince a un État assez puissant pour pouvoir au besoin se défendre par lui-même »18
« […] Les armées venant de l’extérieur ] sont toujours dommageables à celui qui les appelle : car si elles sont vaincues, il se trouve lui-même défait, et si elles sont victorieuses, il demeure dans leur dépendance »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XIII

Quand la solution devient le problème

Sans qu’il soit nécessaire de débattre sur les développements de chaque auteur concernant les différents types d’armées, incluant notamment les alliés, les milices et les mercenaires, il est nécessaire de disposer d’une armée forte, mobilisée et entraînée. Le moral d’une armée est un élément primordial de la conduite de la guerre.

Cette remarque est à rapprocher du fonctionnement politique contemporain d’organisations qui, en situation de perte de vitesse, pensent pouvoir se régénérer en créant de vastes coalitions d’alliés. Ces mêmes alliés de circonstances se comportent à terme comme des sangsues, puisant et épuisant un corps malade et accélérant irrémédiablement leur flétrissement pour aboutir à l’implosion du corps principal.

Nous pouvons voir dans cette stratégie perdante l’expression des idées développées par les psychologues-chercheurs de l’école dite de Palo Alto, selon lesquels, faute d’un changement radical, les solutions avancées deviennent elles-mêmes les principales sources de problème : « La solution est le problème » Changements, Paul Watzlawick

[ L’école de Palo Alto, du nom de la ville de Palo Alto en Californie est un courant de pensée et de recherche dans les domaines de la psychologie, de la psycho-sociologie et des sciences de l’information et de la communication.]

Il ne faut jamais cesser de faire de la stratégie

« Mépriser l’Art de la guerre , c’est faire le premier pas vers sa ruine; le posséder parfaitement, c’est le moyen de s’élever au pouvoir »
« Un maître sans armes ne peut jamais être en sûreté parmi des serviteurs qui en ont »

Nicolas Machiavel, Le Prince, XIV

Le Prince se doit d’envisager l’exercice du pouvoir avec une vision analytique. Il doit anticiper, analyser et se tenir préparé à toutes les éventualités. Miyamoto Musashi le précise lui-même dans son Gorin No Sho : « Nous avons tendance à penser que la vie quotidienne diffère d’un moment de crise[…] Peu importe que cela arrive ou non, le samouraï doit être prêt en permanence».
La stratégie est omniprésente, en tous lieux et en tous temps. L’absence de schéma de pensée structuré conduit à l’abandon de toute stratégie au profit de mouvements tactiques permanents, incohérents, souvent contradictoires qui aboutissent immanquablement à la défaite.

En conclusion

Ce petit exercice ne revendique aucune exhaustivité. Il met simplement en avant les principes que nous relevons comme fondamentaux de la pensée de Nicolas Machiavel. Chacun de ces principes mériterait un développement indépendant.
Quoique publié pour la première fois en 1532, Le Prince pose des bases incontournables dans le cadre d’une réflexion sur la stratégie en général et pour la stratégie politique en particulier.

Nous pouvons retenir cinq mots-clés de la pensée de Machiavel :

  1. Efficacité « Le Prince ne peut-être jugé que sur un seul critère : le succès […] »
  2. Communication « Tout le monde voit ce que vous paraissez »
  3. Entourage « Comment on doit fuir les flatteurs »
  4. Préparation « Mépriser l’Art de la guerre , c’est faire le premier pas vers sa ruine »

Bibliographie

ALTHUSSER Louis , Machiavel et nous,
LIDELL HART Basil Henry, Stratégie,
MACHIAVEL Nicolas, Le Prince, Discours, L’âne d’or,
MUSASHI Miyamoto, Gorin no sho,
SUN TZU, L’art de la guerre,
VON CLAUSEWITZ Carl, De la guerre,
WATZLAWICK Paul, changements,